Vous êtes nombreux à nous demander comment nous vivons au quotidien sur notre voilier.
En voici donc un petit aperçu, notre vie se partageant entre les départs en mer et la découverte des lieux dans lesquels nous arrivons.
Je développerai bien évidemment plus précisément les départs en mer. je vous précise que les parties en bleu sont rédigées par le capitaine.

Lorsque nous partons en mer pour une étape journalière, l’avitaillement se fait pratiquement au jour le jour. Le lever se fait selon l’heure que le capitaine préconise. Il en sera différemment si nous partons pour une traversée, mais j’y reviendrai plus loin. Le petit déjeuner est fortement préconisé avant tout départ, ceci pour éviter le mal de mer. Pour nous qui sommes amarinés, il est tout de même indispensable car une fois partis, nous ne savons jamais quel sera l’état de la mer. Tout ce qui peut être fait avant le départ doit l’être, y compris la préparation du déjeuner, voire du dîner.
Heure de départ : en fait comme ici les marées sont faibles et ne génèrent pas de courant comme en Bretagne l’heure de départ est essentiellement calculée pour éviter une arrivée de nuit.
Après le petit déjeuner, les habitudes sont prises. Le capitaine calcule la route finement, pendant que je range la cuisine puis pars préparer la grand voile ou le retrait de l’ancre. Le moteur est mis en route et le départ est lancé. Dès que nous le pouvons, je mets le voilier au vent et le capitaine hisse la grand voile, soit complètement, soit en laissant un ri, selon les conditions de mer et de vent. Le génois sera ensuite déployé.

Nous commençons à bien connaitre le bateau. Au près (quand on a le vent face à nous ou dans un angle inférieur à 90°) et si le vent ou les rafales sont supérieures à 12-13kn (environ 25km/h) nous prenons systématiquement un ri. Ce qui signifie réduire la surface de grand voile. Par sécurité aussi nous prenons cette mesure pour les navigations de nuit. Ensuite nous adaptons la surface de voilure en utilisant plus ou moins de surface de la voile d’avant, qui est le véritable moteur du bateau. Quand le vent est portant c’est une tout autre affaire, dont nous reparlerons quand nous commencerons enfin à avoir ce sacré vent favorable !
Ensuite la journée se déroule entre veille pour éviter les casiers, voiliers, cargos ou bateaux de pêche, et bricolage pour le capitaine, car il y a toujours à faire sur un voilier ou encore mini sieste lorsque les conditions sont dures. C’est incroyable comme le corps se fatigue lorsque ça tape fort ou qu’il fait froid.

Café, encas, repas, gouter, rythment la journée. Le temps ne passe pas de la même façon sur mer que sur terre. Nous écoutons bien plus notre corps.
A l’arrivée, nous abaissons la grand voile le plus tard possible puis préparons le bateau soit pour le mouillage, soit pour une arrivée en marina. En marina, la manœuvre est bien plus compliquée, même si des amis rencontrés dernièrement nous ont appris la « manœuvre d’embelle », tellement plus facile pour moi qui n’ai plus à sauter tant bien que mal sur le ponton ! Dans le cas d’un mouillage, c’est au capitaine de trouver le meilleur endroit avec juste ce qu’il faut de fond, pas trop de bateaux autour de nous et surtout pas trop de courant. Il me suffit juste ensuite de jeter l’ancre et l’affaire est faite !
Effectivement l’arrivée au mouillage, sur ancre ou sur bouée est plutôt facile. Du moins en apparence. En fait quand on pose une ancre on a plein de paramètres a prendre en compte : profondeur à l’arrivée et variation de marée, présence et force de courant et de renverse (le bateau changera ou pas de direction dans la nuit), exposition au vent, espacement aux autres bateaux, distance à la cote, protection à la houle et au clapot, nature du fond, le sable est idéal mai il y a aussi les fonds vaseux, d’algues, de roche…. Bref pas si simple… Mais, au final, comme nous avons de bonnes cartes et avec les différents sites d’infos nous nous en sortons plutôt bien.

Si nous partons pour une plus longue navigation, l’avitaillement est bien plus important. Il est nécessaire d’organiser les déjeuners et dîners et un plat consistant doit être prévu pour les soirs afin que les nuits soient plus faciles à passer. Le plat consistant sera très souvent préparé par le capitaine, bien plus agile en cuisine que moi en pleine mer.
Les jours et nuits se feront selon le rythme biologique, c’est-à-dire que les repas seront pris lorsque nous avons faim et seront plutôt légers mais fréquents. La nuit, il apparaît important de grignoter régulièrement pour que la fatigue ne vienne pas trop vite.
Les repas de prédilection : goulash ou patate au lard. Mais je vais tacher de diversifier un peu et me lancer sur un pot au feu la prochaine fois.

Dès la nuit tombée, nous nous harnachons de nos gilets, lumières et l’alarme d’homme à la mer pour le cas où l’un de nous tomberait en mer.

La consigne est que s’il est nécessaire d’aller sur le pont à l’avant, le second est systématiquement réveillé pour suivre la manœuvre. Ensuite, pour ce qui est du rythme de repos, le premier ayant sommeil ira dormir, sans limite de temps. Nous avons ainsi découvert que nous ne dormions jamais plus de 2 heures, et sans avoir à mettre de réveil. Etonnant ! Nous dormons en général dans la cabine arrière pour être prêt à toutes manœuvres inopinées. Et bien évidemment, si les conditions sont plus dures, le capitaine sera bien plus sollicité et ne dormira que d’un œil… Les nuits sont toujours différentes, selon qu’elles sont noires -donc oppressantes- ou éclairées par la lune…
Sur ces deux mois, hors la traversée du golfe de Gascogne, nous avons eu en début de navigation le vent de face, puis de la pétole, ce qui veut dire des heures de moteur. Heureusement nous avons quand même touché 24h de vent favorable. Tout ceci accompagné d’une forte houle.
Il parait que c’est très fréquent sur cette partie de parcours. Au fur et à mesure de notre avancée cela devrait être plus calme.

Lorsque nous sommes au mouillage, nous devons préparer l’annexe pour descendre à terre, trouver un endroit où l’arrimer, ce qui n’est pas toujours évident.

Promenade et découverte puis retour au bateau pour la soirée et la nuit. Douche à bord… voyez par vous-même.


C’est quand même très agréable, surtout quand elle est chaude, ce qui est le cas la plupart du temps.
Au port ou au mouillage nous mettons le bateau en configuration “vie à bord” : rangement des appareils, équipements et outils de navigation. Sortie des vélos, parfois du kayack,

matériel de nage (pmt), installation de la table extérieure, du bimini s’il fait trop chaud. Nous recherchons aussi la meilleure solution internet. Pas toujours simple.
La connexion à bord : Nous sommes devenus moins ignorant sur plein de sujets. D’abord la 4g. Tant que nous sommes en Europe, et même dans certains autres pays, la 4g reste une excellente solution pour rester connectés. Pour le moment nous faisons avec nos abonnements (judicieusement choisis avant notre départ) habituels. Ensuite nous achèterons une sim locale dans les pays non couverts par nos opérateurs. Nous avons aussi une carte internationale. Enfin l’an prochain nous prendrons une solution satellite. Nous en reparlerons.
Il nous a fallu apprendre à faire ce que font les jeunes tous les jours : connaitre et maitriser sa conso internet. Pas si difficile finalement. Nous nous en sortons avec Isa 12Go/mois, et moi 15Go. Et il nous en reste quelque fois à la fin du mois, si si !
Le wifi du port… Chaque marina offre un réseau wifi De plus ou moins bonne qualité. Plus ou moins bien recu selon sa position dans le port. Sur ce point j’ai investi l’arme atomique (119€) : antenne ampli de 2.4ghz qui capte tout à 1km à la ronde. Connectée à un routeur wifi ca me permet de recevoir un signal de qualité, que je retransmet dans le bateau sur le réseau local Maverick ! Joli non ? Inutile de vous dire que ca fait des envieux sur les pontons… Rester connecté est un sujet, comme quoi on reste des humains du 21eme siècle.
Si nous sommes au port nous avons du 220v. Nous sortons alors la bouilloire électrique, le petit chauffage d’appoint. Bientôt nous aurons aussi la plaque électrique et la Nespresso, nous attendons la bonne affaire.
Au sujet de l’électricité : nous sommes entièrement autonomes à bord. Panneau solaire de 200w, éolienne de 350w et alternateur du moteur maintiennent en charge notre parc de batterie de 400ah. Cela nous donne une bonne autonomie au vu de la faible consommation des appareils du bord (compter 20ah par 24h). Le seul hic c’est que si nous avons bien du 220v grâce à un convertisseur de tension, et que c’est parfaitement adapté pour recharger les pc portables, tablettes, smartphones, la puissance est limitée à 350w… cela exclut bien des appareils, que nous ne pouvons donc utiliser qu’une fois branché à la prise 220v du ponton.
Nb technique : 400ah de parc batterie ne représente pas notre autonomie comme on pourrait le croire benoitement. Les batteries au plomb ne doivent pas être déchargées de plus de 20%. Ce qui nous donne une autonomie sans aucune recharge de « seulement » 80a/h. Le prochain parc batterie, au gel, nous permettra une décharge profonde de 50%, ce qui augmentera notre autonomie. Mais comme nous n’en avons finalement pas besoin j’envisage plutôt, quand nous aurons ce nouveau parc, de changer aussi notre convertisseur, histoire de pouvoir disposer de 220v et 1200w de puissance…..
Lorsque nous sommes à terre, nous nous inscrivons en marina.

Nous y découvrons les sanitaires qui sont très différents les uns des autres.

Cela reste des sanitaires collectifs ce qui nous poussent à nous offrir de temps en temps des escapades en hôtel afin de bénéficier d’une vraie douche/baignoire et d’un vrai lit. Et c’est un vrai luxe…
Choix des destinations : Fidèle à ses habitudes Isa épluche tous les guides nautiques et de tourisme du coin ou on se trouve. L’idée était de descendre toujours au sud, maintenant que nous sommes au sud du continent ou vire à l’est. Cette route de principe actée Isa choisit les villes à visiter, et recherche et compare les marinas, les mouillages. L’application Navily nous fournit un contact direct ou des commentaires de navigateurs ayant testé l’endroit choisi.
Une fois rendus Isa encore fait le programme de visites incontournables, randonnées etc. Pour le moment nous sommes bien sur le littoral mais nous ne tarderons pas, surtout ici e n Espagne, à louer une auto pour entrer un peu dans les terres. Ou partir en rando itinérante deux ou trois jours, histoire de visiter l’arrière-pays.
Au sujet du bricolage sur le bateau : certains d’entre vous se sont étonnés du nombre de bricoles réalisées sur le bateau. Pas d’inquiétude, c’est le lot commun à tous les navigateurs en voyage. Quel que soit le bateau (neuf, ancien, chantier, amateur) quand on ne répare pas on vérifie. Et il faut y consacrer au moins plusieurs jours par mois pour éviter que les bricoles ne deviennent de vrais problèmes. Dans notre cas, recherchant l’autonomie maximale en prévision de nos futures destinations beaucoup plus exotiques, nous avons décidé de ne faire appel aux chantiers que si l’on ne peut vraiment pas faire autrement. Cela préserve la caisse de bord et renforce notre autonomie. En plus des bricoles à réparer (c’est exigeant la mer, et le matériel souffre beaucoup, surtout quand il y a mauvais temps) nous réalisons aussi quelques améliorations et aménagements.

Tout ça pour dire qu’il n’y a aucune inquiétude à avoir, nous menons la vie normale du voyageur à la voile.
Pour comparaison nous avons déjà rencontré sur la route plusieurs catamarans contraints de sortir leur bateau de l’eau pour des problèmes d’infiltrations d’eau dans le moteur ou problèmes d’hélice, un bateau contraint de démâter pour corriger un défaut à l’intérieur du mat, un autre qui a cassé son attache d’écoute de grand-voile, libérant la baume qui a cassé la capote de près en dur. D’autres avec des soucis de moteur, une semaine d’attente de la pièce…. Certains des bateaux cités étaient neufs, celui qui a eu le plus de soucis vaut 700k€ et sort à peine du chantier…. No comment !

C’est ainsi, il faut l’accepter, et il y a ceux qui font systématiquement tout réparer au chantier du coin, et ceux qui réparent par eux-mêmes, question de moyens et de philosophie.

Petit lexique :
Baleines : Entrevues à notre arrivée sur les côtes de la Corogne. Magique !
Coucher de soleil : Absolument extraordinaires !


Dauphins : Que de merveilleuses rencontres. Nous ne nous en lassons pas. Nous avons pu en voir tout au long de la descente des côtes d’Espagne puis du Portugal. A chaque fois ce furent des spectacles uniques. Nous espérons les retrouver très vite…

Doudous : les aides du capitaine, confiés par notre Lucas de Lalbenque. Cela leur permet de voir du pays et de prendre de la hauteur !

Navily : application internet très précieuse qui nous permet de trouver les mouillages et marinas, ceci complété par les commentaires des contributeurs. Nous l’utilisons très régulièrement et prenons également souvent contact avec les membres pour obtenir les renseignements complémentaires.
Orques : Nous ne les avons pas rencontrés, et pourvu que cela ne nous arrive jamais. Mais dès notre arrivée à la Corogne, il y avait interdiction de naviguer sur certaines parties des côtes. Il s’est ensuite avéré que les orques descendaient, comme nous, vers le sud. Plusieurs bateaux rencontrés ont été attaqués, mais sans dommage gravissime, les orques ne détériorant que les safrans. Pas de bateaux en perdition mais de vraies frayeurs. Plusieurs histoires circulent car ce ne sont pas, en général, des animaux dangereux… Les spécialistes étudient ces comportements déviants mais ne comprennent pas…
Pêche : Pas si facile que cela. Pourtant nous avons tout le matériel nécessaire. Mais le capitaine persévère et nous arriverons bien à en déguster. J’ai tout plein de recettes prêtes à être testées !
Rencontres : Nombreuses et souvent très fortes. Les amitiés se nouent très vites d’autant qu’elles seront souvent éphémères. Les chemins de chacun se croisent et se décroisent selon les destinations. Jusqu’à maintenant nous avons rencontré de nombreux bretons, mais aussi des belges, des hollandais. Beaucoup voyagent en famille, en catamaran (ceux-ci sont bien plus vastes, génèrent de l’électricité ce qui permet d’avoir à bord congélateur, nespresso, voire thermomix) et partent en direction des Antilles via les Canaries.

Mais d’autres prennent le temps, comme nous, tels que Fanch et Cathy que nous retrouverons à plusieurs reprises.

Repas breton : impossible de s’en passer !

Toujours très plaisant de vous suivre dans votre vie de tous les jours, ce qui permet de vraiment découvrir la vie à bord.
Bonne route ou plutôt bon vent comme on dit !
Jean
Merci chère sarah-pearl! Desbisouxxx
Merci beaucoup!
Génial! je me régale de vos ecrits comme de vos photos et différents post sur les réseaux sociaux. merci pour toutes ces infos, cela nous permet de comprendre et de voir que tout se passe au mieux. et si jamais vous croisez de nouveau des baleines, vous savez à qui penser 😉
des bises
Super si ça vous plaît. Effectivement tout se passe bien, même si rien n’est vraiment simple. Surtout avec ce satané covid qui rends la planete folle !
Merci chère sarah-pearl! Desbisouxxx
Merci à vous deux pour ces explications, complètes, précises et tellement enrichissantes pour les non avertis que nous sommes. Il n’y a, finalement, qu’en naviguant que l’on peut se rendre compte de la complexité du travail et des règles qui s’imposent. Vous formez un couple complémentaire, soudé et performant qui rassure. Bravo et merci pour toute cette communication très réussie qui fait notre bonheur, un travail de pro.
merci de nous faire partager votre vie à bord que l’on croyait paradisiaque , certes elle l’est au vu des paysages que vous nous montrez , mais c’est aussi apparemment très compliqué de vivre sur un bateau. bravo pour votre détermination et merci de nous faire voyager, nous qui sommes cloués à terre avec un périmètre d’action de 20 km maintenant!