Notre dernière navigation de l’Ile à Vache à Fort de France

Il y a 24h, nous arrivions tout juste a l’ile a Vache et nous voilà de nouveau dans les starting-blocks. Le créneau météo favorable est confirmé et très court.

Nous devons repartir ce jour à 6h00 pour espérer arriver dans les temps à Fort de France. Nous manœuvrons entre casiers et filets.

Nous ne saurions recommander de ne venir ici que de jour car il y en a beaucoup et peu matérialisés. Nous contournons largement la pointe pour éviter un large banc de sable où la mer se brise. Nous rencontrons encore quelques bateaux de pêche se déplaçant uniquement à la voile (video). Qu’ils sont courageux car la mer n’est pas confortable ici!

Et c’est reparti, dès que nous nous écartons des îles. La mer se forme avec une houle de 5 à 6 mètres, bien plus que celle annoncée de 1 a 2 mètres sur les modèles météo. Par contre, le régime de grains est bien là. Ça rincera le bateau !

Le capitaine annonce ces 24 premières heures toniques avant de trouver un vent et une mer plus clémente. On verra bien !

Pendant ce temps-là, où je me traîne comme une pauvre ère, le capitaine bricole dans les fonds pour découvrir le monde des vannes de Maverick.

On n’est vraiment pas fait pareil! Direction la couchette. Je serai mieux dans mon lit. Ah oui, au fait, on ne vous a pas dit mais à la différence de Maverick2 nous dormons dans notre lit, même les temps de veille. Là aussi que du bonheur !

Bon, les 12 heures suivantes de nuit, ont été plus que toniques. C’est le plus gros temps que nous avons vécu sur Maverick3. Ça a bastonné dur entre grains, grosse houle et vent. Car, comme l’expliquera le capitaine, nous sommes dans une zone de forts courants océaniques. Les dépressions en série passées ces derniers jours, conjuguées à ces courants, génèrent une forte houle, courte et croisée. Comme c’était nuit noire, nous n’avons pu qu’imaginer. Et le vent est monté, jusque 41 nœuds en rafale (80 km/h) un 35 nœuds établis (70 km/h). Nos 2 ris dans la grand voile, comme dans le génois se sont révélés précieux. il a fallu manœuvrer de nuit, et je n’ai pas été flamboyante, loin de là…

Au petit matin, quand j’ai vu ces vagues, pourtant légèrement en baisse, j’ai mieux compris ce que nous avions vécu la nuit (video).

Loin de moi de dire que ce sont des conditions extrêmes, mais n’étant pas habituée au bateau, l’imagination court tout particulièrement lorsqu’on est ballotés comme des fétus de paille, inondés de vagues qui passent largement au dessus du cockpit, et assaillis par les craquements et chocs des vagues sur les coques. Nous sommes littéralement soulevés sur les couchettes.

Il en va ainsi de la vie en mer en catamaran, bien plus bruyant qu’en monocoque.

Bon, évidemment, si nous avions été avec Maverick 2 nous n’aurions pas pu passer par cette route au près. Nous aurions terriblement giter et n’aurions pas pu remonter au vent comme avec notre nouveau Maverick. Sans parler de la vitesse supérieure, très importante dans une telle houle.

Et voilà, une nouvelle journée, toujours avec cette forte houle. Le vent a baissé. C’était prévu. Pourvu que la nuit soit meilleure…

Elle le sera. Des quarts un peu plus tranquilles, un repos récupérateur et un petit virement de bord à 3h du matin. Mais nous commençons à être habitués!

Une nouvelle journée commence et avec elle son lot de bricolage ! Hier c’était la pompe de cale bâbord et accessoirement le moteur gauche toujours mal-allant…

Aujourd’hui c’est la pompe d’eau douce. Séquence recherche du problème, contorsion dans les fonds, démontage. Et le problème est résolu. Il aura fallu deux matinées…


Les nuits et les journées passent toutes sur le même modèle. Tous les jours un problème à résoudre. Normal, le bateau souffre fort dans cette allure au près et dans ces vagues, moins importantes qu’au départ, mais toujours avec des creux de 2 à 3 mètres, et une houle courte. Pourtant Equilibre, de son nom précédent, est en parfait
état. Pascal et Evelyne l’ont merveilleusement bien entretenu.

La fatigue commence à se faire sentir. Aucun repos calme. Toujours à être secoués, avec les chocs des vagues sur les coques. Pourtant, sur cette portion de route, peu de rencontres la nuit. Mais de nombreux grains. Et toujours cette houle…

Le capitaine est également occupé tous les jours. Et des heures à récupérer la météo et à l’adapter sans cesse à notre route. Mais ceci est son domaine de prédilection, il s’en régale et il vous en parlera lui même.

Enfin, après une nuit où nous avons eu l’impression de retourner sur nos pas, le cap étant impossible à tenir, le vent tant espéré et repéré par le capitaine, arrive. De joie, nous mettons toutes voiles dehors. Puis une heure après, il nous faut être raisonnables. Nous reprenons un ri pour ne pas risquer un incident. Et c’est très bien car nous avançons aussi vite. Enfin la mer est plus calme, la houle moins hachée. Le repos du guerrier, entre cigare et mots fléchés !

L’espoir revient d’arriver à tant pour notre avion samedi 23 décembre. Nous pouvons enfin petit déjeuner et déjeuner dans le cockpit.

Nous restons connectés via le téléphone satellite. Nos messages sont restreints, pas de photos, peu d’appels car on ne s’entend pas. Ça nous permet quand même d’être présents a minima, de souhaiter les anniversaires, d’envoyer nos pensées à ceux que nous aimons… mais c’est décidé, dès que nous aurons l’occasion, nous passerons à la révolution « starlink ».

Le bureau du capitaine !

En attendant, nous avons des nouvelles de la famille et des amis, et pas toujours de bonnes nouvelles. Ainsi le choc : notre amie Laurence s’est éteinte. Elle ne passera pas les fêtes de Noël avec sa famille à Lisbonne. Nous ne la reverrons plus. Les larmes coulent. Mais ainsi va la vie…

Ma Lolo

Voila, c’est fini. Tu es partie. Un immense vide. Ton étoile nous éclairera sur nos routes maritimes, pour être toujours présente près de nous.
J’entends encore ta voix joyeuse, prendre de nos nouvelles, s’inquiétant de nous, toi qui a toujours pensé avant tout aux autres.
Tu étais la joie de vivre, tu as croquée la vie à pleines dents. Tu t’es battue jusqu’au bout. Tu y as cru jusqu’au bout, avec l’aide inestimable de Ludo et Stéphanie, ton amie, ta sœur
de cœur, et de ta famille.
Ainsi va la vie. Nous resterons avec nos souvenirs de toi, ton immense sourire, tes rires, de toi à Lisbonne, dans ton chez toi que tu aimais tant. Cette vie que tu t’y étais construite, en faisant face avec un courage inouïe à toutes les galères qui te tombaient régulièrement dessus.
Une amitié de plus de 20 ans. Tant de souvenirs… A Cascaïs (Lisbonne) où tu as découvert Maverick2. Que du bonheur passé ensemble. Tu ne te voyais pas vivre dessus mais tu
voyageais à travers nous.
Que du bonheur, à notre mariage, à Saint Malo ; en combinaison, toujours à Saint Malo, pour une séance de longe côte ; à mon enterrement de vie de jeune fille où tu avais tapé dans l’œil d’Enrico Macias, l’idole de la maman de Geneviève.
Au travail, où tu suscitais aussi la jalousie parce que tu étais belle et que tu le revendiquais. Le regard de certains/es, parmi les plus hautes sphères qui détestaient te voir en tenue civile. Tu parlais à tout le monde, sans exception, et ça ne plaisait pas toujours…
Nos rendez vous dans les bars, les restaurants class que tu
affectionnais, et tant d’autres moments passés ensemble.
Tu appréciais plus que quiconque chaque instant qu’il t’était donné de vivre.

Au revoir mon amie. Tu es là et resteras toujours dans nos cœurs.

Encore une nuit, à louvoyer avec le vent qu’on espère toujours favorable. Les délais se raccourcissent…

Et voilà, au matin, le boulot du jour : mais quel est ce petit bruit et ce petit boulon tombé du ciel ? Il faut tout de suite voir d’où ça vient…

Et c’est trouvé !

Il faut tout de suite réparer. Ce sont les vis du bout de baume qui se sont cisaillées…

Au Capitaine de jouer !

Et le vol pour la France approche, de plus en plus. Nous tremblons de ne pouvoir arriver à temps.

En attendant, quelques couchers de soleil !

Le capitaine charge la météo 3 fois par jour pour essayer d’améliorer au maximum la route. Nous n’osons plus communiquer sur notre arrivée… Jean Benoît me demande l’heure limite d’arrivée. Ça devient très compliqué et nous commençons à ne plus y croire.

En attendant, rencontre en mer,

et le gros paquebot MSC, que nous retrouverons au port à Fort de France

Et tout à-coup les alizés, qui n’étaient pas annoncés, soufflent. Nous en profitons au maximum durant 5h. Ils nous permettront d’arriver à temps, car juste après plus rien…

Terre en vue !


4h de moteur mais pas de vent ni de courant de face. Ouf. Nous avançons doucement mais sûrement et arrivons à la Marina à 11h00 après 9 jours et 1240 miles (alors qu’en ligne droite cela fait 750 miles). Mais le catamaran ça avance à la voile et non au moteur !

Je précise sans courant et sans vent car si tel n’avait pas été le cas, nous aurions pu mettre des heures avant de pouvoir entrer dans la baie, nos moteurs n’étant pas assez puissants pour braver ceux ci.

Sachant que notre vol décolle à 18h00, il nous reste 3h pour sécuriser Maverick sur sa bouée, le mettre en mode « sommeil », et faire les formalités d’entrée.

Heureusement durant ces heures de moteur nous avons pu nettoyer, ranger proprement les voiles, nettoyer les cales…

Mais il y a de menus travaux à faire et heureusement notre copain Gael, du bateau Pepper Green, est là pour nous assister.

Et « miracle », le vol est retardé de 3h00 ! Nous allons pouvoir souffler un peu . Je vais gérer et nettoyer le linge, entre draps, serviettes et tenues courantes, le sel s’étant insinué partout.

Inutile de vous dire que jamais nous n’avons été aussi courts sur les délais. Il faut en général au moins une journée pour fermer et remettre au propre le bateau après une telle navigation. Mais l’important est de décoller et d’arriver à temps pour passer Noël en famille.

Et ce sera le cas pour notre plus grand bonheur comme celui de la famille. Fatigués mais heureux !


Belle et heureuse année 2024. Et rendez vous pour notre dernier article sur l’année 2923 consacré à Cuba !

Et aussi le mot du capitaine, plus technique, sur ces navigations !

4 thoughts on “Notre dernière navigation de l’Ile à Vache à Fort de France

  1. merci beaucoup pour vos récits que je lis toujours avec délectation (depuis le départ) , vous nous permettez de vivre un peu votre fabuleux voyage c’est super ….

    Eric de Saint-Malo

  2. Bon pour votre baptême de catamaran, vous avez choisi les conditions les plus difficiles. C’est une bonne idée, car maintenant tout vous semblera plus facile :). Oui c’est toujours le dilemme entre vitesse et confort (sauf au vent arrière où c’est vitesse et confort .. jusqu’à un certain point). En tout cas, bravo pour cette belle navigation dont vous allez garder le meilleur et merci que la météo de ne pas vous avoir fait rater votre avion.

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